Niveau 2 / Biodiversité : Problèmes, enjeux & perspectives
La biodiversité, ses écosystèmes et les interactions qui y règnent
La biodiversité désigne toutes les formes de vie : la faune, la flore, mais également les champignons, les bactéries, les microbes, etc. Il ne serait pas raisonnable de faire une liste exhaustive de toutes les ressources qui composent la biodiversité et les liens qu’elle entretient avec son environnement. Néanmoins, on vous a fait une sélection (arbitraire) de quelques ressources qui vous permettront et donneront envie de creuser les thèmes qui vous intéressent :
- Divers films, séries et documentaires sur la biodiversité
- La chaîne Youtube du Muséum d’Histoire Naturelle ou le podcast de cette même institution
- Les conférences de l’Espace des Sciences et de l’Agora du Savoir
L’étude de toutes ces formes de vie repose nécessairement par l’observation des liens qu’elles entretiennent entre elles et avec leur environnement. Ce sont tous ces liens, de dépendance, de prédation, de transmission d’information, de symbiose, etc, qui définissent un écosystème. Ces réseaux complexes sont particulièrement résilients car ils reposent sur des équilibres qui s’autorégulent. Par exemple, dans une relation proie-prédateur, le nombre de l’un dépend intimement du nombre de l’autre : il est facile d’imaginer que l’augmentation ou la diminution de l’un modifie le nombre de l’autre, qui en retour affecte le premier, et ainsi de suite. Typiquement, si un prédateur venait à chasser toutes ses proies, il disparaîtrait lui-même, ne pouvant plus subvenir à ses besoins. Tous les liens possibles qui unissent deux espèces, qu’ils soient bénéfiques, néfastes ou neutres pour l’un et/ou l’autre, sont regroupés sous le terme d’interactions écologiques. Parmi celles-ci, on retrouve :
- La symbiose et le mutualisme, bénéfiques aux deux espèces
- La compétition, néfaste aux deux espèces
- Le parasitisme et la prédation, néfaste à l’un et bénéfique à l’autre
- L’amensalisme, neutre pour une espèce et néfaste pour l’autre (un escargot écrasé par un boeuf)
- Le commensalisme, neutre pour une espèce et bénéfique pour l’autre (les poils de cheval servant de matériau pour le nid de certains oiseaux)
Ces interactions sont nombreuses et complexes : nous invitons les lecteurs et lectrices à faire leurs propres recherche à partir de ces quelques mots clefs, qui les conduiront à de nombreuses ressources ici et là. Néanmoins, les vidéos précédemment citées de l’Espace des Sciences et de l’Agora des Savoirs sont de très bons points de départs.
Mesures et causes de l’érosion de la biodiversité
Lorsqu’on parle des dangers qui pèsent sur la biodiversité, on pense souvent aux ours sur leur banquise, aux éléphants et aux rhinocéros chassés pour leurs cornes, aux requins pour leurs ailerons, ou aux abeilles qui subissent les méfaits des pesticides. Ces espèces sont très photogéniques et bénéficient d’une exposition médiatique qui, pour une partie d’entre elles, leur assure une certaine protection. On ne peut que s’en réjouir, mais il ne faut pas oublier que la diminution de la biodiversité, qu’importe la manière dont elle est calculée (nombre d’individus, répartition géographique, nombre d’adultes en état de procréer, …), est une tendance générale qui se retrouve chez la majorité des espèces, sur tous les continents et dans tous les climats, comme nous le rappelle la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature.
Ces nombres indiquent qu’il ne s’agit pas d’un simple changement d’équilibre – qui se traduirait par la diminution de certaines espèces au profit d’autres – mais bien du déclin généralisé de nombreuses espèces. DataGueule propose une rapide introduction à ce sujet dans sa vidéo intitulée “Biodiversité, l’essentielle différence”. Deux éléments que vous avez peut-être remarqués renforcent ce constat. Le premier est l’effet du changement climatique sur les dates et les lieux de migrations des oiseaux, qui sont obligés de s’adapter aux changement de température et aux modifications de leur alimentation dans les lieux qu’ils fréquentent ; sujet repris dans l’émission “Demain, un monde sans oiseaux?” du Dessous des cartes. Le second point est connu sous le nom de “syndrome du pare-brise” : il y a quelques décennies à peine, les véhicules succombaient sous la mitraille kamikaze et incessante de petites formes de vie, essentiellement des insectes. Dorénavant, la propreté des pare-brises est souvent quasi-irréprochable, signant la diminution drastique du nombre d’insectes dans nos contrées européennes.
Le dérèglement climatique est l’une des raisons de cette érosion. Celui-ci affecte et transforme les différents milieux de vie, et par là les espèces qu’ils accueillent ; changements devant lesquels toutes les espèces ne sont pas égales. Certaines peuvent migrer pour (essayer de) trouver des conditions de vie similaires. En revanche, d’autres en sont incapables, comme c’est le cas pour les coraux ou les plantes et arbres dont la vitesse de déplacement (entre générations, s’entend) est plus faible que la rapidité du changement de l’environnement. De plus, ces espèces font nécessairement partie de la chaîne alimentaire, contraignant celles qui en dépendent à trouver un substitut … ou à disparaître. Le vide laissé par les espèces qui migrent ou disparaissent ne reste pas vacant et profite à d’autres qui se retrouvent sans prédateur et prolifèrent.
Mais la menace qui pèse sur la biodiversité ne peut se réduire à sa composante climatique uniquement. En effet, elle est plus généralement liée à une dégradation, une réduction et une destruction des espaces de vie, en lien direct avec les activités humaines qui déstabilisent par là ces écosystèmes. Cette déstabilisation met directement en danger les espèces ou indirectement leur capacité à se reproduire. Les causes sont multiples et complexes, et lorsque les scientifiques en révèlent certaines, il faut garder à l’esprit qu’il en existe éventuellement d’autres, et qu’elles se nourrissent toutes mutuellement. L’excellent rapport “Evaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques” de l’IPBES, organisation de l’ONU qui synthétise l’état de la science sur la biodiversité, classe dans l’ordre d’importance suivant les principaux facteurs qui ont causés le plus de dégât à la nature :
- la modification de l’utilisation des terres et des mers
- l’exploitation directe des organismes
- les changements climatiques
- la pollution
- les espèces exotiques envahissantes
Pour rentrer plus en détail, on citera :
- Le prélèvement abusif d’espèces comme la surpêche (vidéo du Réveilleur) ou le braconnage.
- Le dérèglement climatique responsable de l’acidification de l’eau (vidéo du Réveilleur) ou de l’eutrophisation, qui résultent en une prolifération d’algues ou d’autres nuisibles (vidéo du Réveilleur). Plus globalement, le GIEC a fait état de l’impact du dérèglement climatique sur la la biodiversité, dans son rapport “Réchauffement Planétaire d’1.5°C” de 2018.
- L’aménagement du territoire, qui résulte en une artificialisation des sols, transformés en routes, en habitations, en zone d’activités, … certains dommages étant recensés sur la Carte des Impacts Climatiques, créée par l’Affaire du Siècle.
- Les pesticides – dont le rôle même est de faire disparaître certaines espèces (vidéo du Réveilleur) – longuement discuté dans le livre “Et le monde devint silencieux” de Stéphane Foucart et dans le livre Nous voulons des coquelicots.
- Les différentes pollutions, notamment plastique (vidéo du Reveilleur).
- La déforestation (vidéo DataGueule) et les incendies qui réduisent les espaces de vie
Une excellente visualisation de ces problématiques est proposée par Global Forest Watch.
On citera aussi l’agriculture classique ou conventionnelle, car elle est directement responsable de la déforestation, de la perte de biodiversité due à la sélection (génétique) des espèces, ou encore due à l’usage de pesticides qui dégradent la vie dans les sols, etc. Pour en avoir une description plus claire, nous vous renvoyons vers l’interview de Olivier Schutter pour le podcast Présages, ce dernier s’étant occupé des questions d’alimentation à l’ONU.
Il faut ajouter à cela que la contraction des espaces de vie finit nécessairement par mettre les espèces en compétition sur des territoires plus limités. Ainsi, les menaces qui pèsent sur la biodiversité et ses écosystèmes ne se résument pas à la disparition ou à l’incapacité de se reproduire des espèces, mais aussi à leurs réorganisations qui peuvent être favorables à l’apparition ou l’échange de virus, microbes, bactéries et autres indésirables.
Une grande partie de ces informations, et bien d’autres, sont reprises dans le rapport de l’IPBES cité auparavant. En supplément, on conseillera un rapport similaire, le “Rapport planète vivante” du WWF qui revient sur les preuves, les causes et les conséquences de l’érosion de la biodiversité.
La disparition de certaines espèces, mais surtout la diminution du nombre de représentants de chacune d’entre elles inquiètent de nombreux scientifiques dans la mesure où elles adviennent à une vitesse 10 à 100 fois supérieure à celles constatées auparavant. En réalité, ces taux d’extinction et de diminution se rapprochent de ceux qui ont pu être calculés lors des 5 extinctions massives que la Planète a connues par le passé, dont la plus célèbre a marqué la fin des dinosaures. L’expression de 6ème extinction a été popularisé par Elizabeth Kohler dans le livre éponyme qui décrit l’évolution des connaissances scientifiques d’une part, et dresse un bilan de l’érosion de la biodiversité d’autre part. Autre ressource précieuse : l’interview de Bruno David, président du Muséum National d’Histoire Naturelle, qu’il a accordé au podcast Présages ou au podcast “Pour que Nature vive” du Muséum National d’Histoire Naturelle.
Services écosystémiques de la biodiversité et conséquences de son déclin
Pour comprendre les conséquences du déclin de la biodiversité, il faut d’abord comprendre les services que les écosystèmes nous rendent – et que nous risquons de perdre. Ceux-ci sont communément séparés en 4 groupes distincts, tels qu’on peut le voir dans l’Évaluation des écosystèmes pour le Millénaire :
- Les services de prélèvement ou d’approvisionnement : la nourriture, le bois, certains combustibles, des produits destinés à des usages médicinaux, …
- Les services de régulation : le climat, les inondations, l’eau, les déchets, certaines maladies, …
- Les services d’auto-entretien ou de support : la formation des sols, la photosynthèse, la décomposition de la matière organique, les cycles du carbone, de l’azote, du phosphore, etc
- Les services culturels : l’éducation, les loisirs, la spiritualité, l’esthétique, les sources d’inspiration, …
Mettre en danger les écosystèmes, c’est inévitablement réduire les services qu’ils nous rendent. Ces aspects sont les éléments centraux des rapports de l’IPBES et du WWF. Ils sont également repris dans les vidéos “Biodiversité” de l’Espace des Sciences, notamment “Pourquoi l’homme a-t-il besoin de la biodiversité” présentée par Joan Van Baaren.
Rappelons finalement que certaines espèces, dont certains microbes ou virus, peuvent représenter des risques pour la santé des hommes. Habituellement, des barrières spatio-temporelles séparent ces agents pathogènes, responsables de nombreuses maladies, épidémies et contagions, des humains. Or, trois facteurs tendent à réduire la distance qui nous en sépare, accentuant le risque de voir (ré)apparaitre ou se propager des maladies anciennes, ou jusqu’alors inconnues :
- La déforestation, la chasse et le braconnage, en s’avançant toujours plus profondément dans les écosystèmes naturels et sauvages, augmente les risques d’échange entre les hommes et certaines espèces.
- La mondialisation, c’est à dire la multiplication et l’accélération des déplacements entre des zones géographiques autrefois disjointes, transporte des espèces nouvelles qui ne cohabitent pas toujours avec les espèces indigènes. A titre d’exemple, la disparition de la civilisation précolombienne est en partie due à l’introduction, par les colons européens, de maladies contre lesquels les peuples amérindiens n’étaient pas immunisés.
- Le changement climatique modifie les zones de répartition géographique de certaines espèces, comme par exemple le moustique qu’on a vu apparaître à de nouveaux endroits. Ce sujet a fait l’object de la vidéo “La géopolitique du moustique” du Dessous des cartes.
Ces dangers pour la santé sont repris dans l’épisode “Une planète, une santé”, par Coralie Martin, du podcast “Pour que Nature vive” du Muséum National d’Histoire Naturelle ainsi que dans l’excellente conférence “Faut-il craindre les épidémies”, d’Arnaud Fontanet par l’Agora des Savoirs.
On ne vous laisse pas sans la possibilité d’agir
En fait, si. Mais c’est en cours, on revient vite !